Du 26 au 29 janvier 2021 a eu lieu devant l’Assemblée nationale une discussion historique sur une Proposition de loi visant à renforcer la lutte contre la maltraitance animale.
Historique, voilà qui caractérise parfaitement cet événement car jamais en effet, dans l’histoire du droit français, le législateur ne s’était saisi de la question de la protection animale de manière aussi large. Interdiction des animaux sauvages dans les cirques et delphinariums, de la vente de chiens et chats en animalerie, de l’élevage de visons pour la fourrure, aggravation des sanctions pénales en cas de maltraitance… Voici quelques-unes des pratiques qui pourraient disparaître à plus ou moins brève échéance.
Le texte, d’abord examiné par la Commission des affaires économiques (rapporteurs : Loïc Dombreval, Laëtitia Romeiro Dias et Dimitri Houbron) a ensuite été discuté en séance publique. À l’occasion des débats, de nombreux amendements ont été déposés (509 au total), preuve de l’importance prise par cette question dans notre société. Cependant, certains sujets majeurs, sources de profondes divisions, ont été écartés (chasse, pêche, corrida, élevages intensifs, …).
Le 29 janvier, par 79 voix contre 2, la proposition de loi a été adoptée. Le gouvernement a fait le choix d’engager la procédure accélérée sur ce texte (une seule lecture par chambre). Cette procédure dérogatoire, véritable instrument du parlementarisme rationalisé, permet au gouvernement d’abréger la discussion parlementaire d’un projet ou d’une proposition de loi[1]. En l’occurrence, on peut penser que le gouvernement souhaite aujourd’hui des avancées rapides en matière de protection animale, la France étant en retard de ce point de vue par rapport à quelques-uns de ses voisins européens (notamment la Belgique) et l’opinion publique exprimant de manière croissante le souhait de mesures de protection en faveur des animaux. Puisque le gouvernement a fait le choix de cette procédure, il est raisonnable de penser que la loi sera votée dans le courant de l’année 2021. Le texte doit dorénavant et avant cela être examiné par le Sénat. Plusieurs cas sont alors envisageables : soit – hypothèse assez peu probable – ce dernier l’acceptera en l’état ce qui conduirait au vote de la loi ; soit il l’amendera et, dans ce cas de désaccord, la procédure accélérée conduit à la réunion d’une commission mixte paritaire (CMP) constituée de sept députés et sept sénateurs[2]. Deux situations peuvent alors se présenter à l’issue de la CMP : 1) Si un accord est trouvé entre députés et sénateurs de la commission, le nouveau texte élaboré par elle sera examiné par les deux chambres qui votent définitivement. Pour ces lectures, seuls des amendements du gouvernement ou acceptés par lui peuvent être discutés. 2) En revanche, si la CMP n’arrive pas à se mettre d’accord ou si son texte n’est pas accepté par les deux chambres, alors le gouvernement peut demander à l’Assemblée nationale de statuer définitivement.
Dans l’attente impatiente de la discussion devant le Sénat[3], certains sujets de la proposition de loi donneront lieu à une note consultable sur le présent site.
[1] Le régime de cette procédure accélérée (avant 2008, on parlait de « procédure d’urgence ») est brièvement défini à l’article 45 de la Constitution et, à titre complémentaire, dans les règlements des deux assemblées, notamment l’art. 102 du règlement de l’Assemblée nationale et l’art. 24 bis du règlement du Sénat.
[2] Le recours à la commission mixte paritaire, également prévu par l’article 45 de la Constitution, permet d’éviter la navette parlementaire indéfinie entre les deux assemblées.
[3] Il est possible de consulter le texte soumis au Sénat en suivant ce lien : http://www.senat.fr/leg/ppl20-326.html