Auteure : Claire Hermand, juriste
Les compagnies aériennes peuvent désormais interdire les “animaux de soutien émotionnel” dans les cabines des vols commerciaux en provenance ou à destination des Etats-Unis
Depuis les années 1990, la réglementation aérienne américaine prévoyait la possibilité pour les passagers de vols commerciaux de voyager en cabine, non seulement avec leur animal d’assistance (“service animal”), mais également avec leur animal dit “de soutien émotionnel” (“emotional support animal”). La réglementation donnait de ce dernier une définition relativement floue, le seul critère d’acceptation étant une attestation d’un médecin affirmant que la présence de l’animal était indispensable au bien-être mental ou émotionnel de son maître.
Au fil des années, toutes sortes d’abus furent constatés, de la simple attestation de complaisance permettant à des passagers de faire voyager gratuitement leur animal en cabine, jusqu’aux cas les plus saugrenus, tels que des passagers voyageant avec un cheval miniature, un cochon, un iguane, un singe capucin ou encore un panda en cabine à leurs côtés[1]…
Si le bien-être des ces passagers était certainement comblé, on ne peut pas en dire autant de leurs voisins de cabine ni du personnel navigant, ces situations ayant bien entendu donné lieu à de nombreux problèmes sanitaires et de sécurité.
Une industrie de la certification de l’animal de soutien émotionnel s’est même développée aux Etats-Unis, permettant de se voir délivrer moyennant finances une attestation plus que douteuse, et décrédibilisant au passage les animaux d’assistance véritablement nécessaires aux personnes souffrant de handicaps.
Pour combler ce flou réglementaire et mettre fin aux abus, le ministère des transports américain[2] a publié le 2 décembre 2020 une “réglementation définitive” (final rule”) qui établit précisément quels animaux peuvent embarquer à bord des cabines des vols commerciaux[3].
Cette règle vient modifier la loi américaine ACAA (“Air Carrier Access Act” [4]), qui interdit la discrimination vis-à-vis des personnes handicapées dans le transport aérien. En effet, c’est ce texte qui prévoit la possibilité pour les personnes handicapées d’embarquer avec leurs animaux d’assistance (“service animals”).
Dorénavant, l’animal d’assistance est défini comme : un chien, peu importe la race, qui a été dressé pour travailler ou exécuter une tâche au bénéfice d’une personne souffrant d’un handicap, qu’il soit physique, sensoriel, psychiatrique, ou qu’il s’agisse d’un handicap mental.
Un passager handicapé ne peut pas voyager avec plus de deux animaux d’assistance sur un même vol.
La nouvelle réglementation permet également aux compagnies aériennes d’exiger que les passagers handicapés voyageant avec un animal d’assistance remplissent un formulaire attestant du dressage et du bon comportement de l’animal, ainsi que de son bon état de santé. Pour les vols d’une durée supérieure à huit heures, le passager doit aussi attester que l’animal est en mesure de se retenir pendant cette durée ou qu’il peut se soulager de manière hygiénique.
L’animal doit également être tenu par un harnais ou une laisse, ou attaché d’une autre manière, pour la sécurité des autres passagers et membres d’équipage.
En ce qui concerne leur taille, les compagnies aériennes peuvent exiger que l’animal tienne sur les genoux de son maître où dans l’espace disponible à ses pieds.
Aussi, à compter du 4 janvier 2021, seuls les chiens d’assistance aux personnes handicapées doivent être acceptés dans les cabines des vols commerciaux (et encore, sous réserve des conditions énoncées ci-dessus), tandis que les animaux dits “de soutien émotionnel” peuvent être considérés par les compagnies aériennes comme de simples animaux de compagnie, et devront donc s’accommoder des mêmes règles que ces derniers. Les compagnies pourront notamment exiger que ces animaux voyagent en soute, et que le prix de leur voyage soit facturé à leur propriétaire.
Les dispositions de la loi ACAA (et donc les modifications qui y sont apportées par cette nouvelle réglementation) sont applicables aux compagnies aériennes américaines et étrangères, pour les vols en provenance et à destination des Etats-Unis.
[2] US Department of Transportation ou “DOT”
[4] Air carrier access act of 1986 (Title 49, Section 41705 of the U.S. Code)